WEDEKIND, LACAN, KUTSCHER, DARGER

FRANCK WEDEKIND
Questionnaire
Qualité préférée chez un homme : le tempérament, l'énergie
Qualité préférée chez une femme : l'intelligence
Mon idée du bonheur : être utilisé selon ses aptitudes
Principale aptitude : au mensonge
Principale inaptitude : à dire la vérité
Science préférée : la science des religions
Tendance artistique : Michel-Ange, Titien, Rubens, Makart
Société préférée : insouciante et gaie
Antipathie insurmontable : du piano mal joué
Ecrivain préféré: Schiller
Compositeur préféré : Beethoven
Livre préféré : Casanova
Instrument préféré : le quatuor à cordes
Héros préféré en poésie : Richard III
Héros préféré dans l'Histoire : Alexandre le Grand
Couleur préférée : rouge
Plat préféré : le poisson, la volaille, la salade verte
Boisson préférée : un petit vin du pays
Sport préféré : faire du théâtre
Jeu préféré : jouer avec le monde
Comment vis-tu ? pas trop mal
Ton tempérament : mélancolique
Ton trait de caractère principal : l'entêtement, j'espère
Devise : 2 X 2 = 4

JACQUES LACAN
Préface à L’éveil du printemps, collection Gallimard

Ainsi un dramaturge aborde en 1891 l’affaire de ce qu’est pour les garçons, de faire l’amour avec les filles, marquant qu’ils n’y songeraient pas sans l’éveil de leurs rêves.
Remarquable d’être mis en scène comme tel : soit pour s’y démontrer ne pas être pour tous satisfait, jusqu’à avouer que si ça rate, c’est pour chacun.
Autant dire que c’est du jamais vu.

ARTHUR KUTSCHER

Wedekind, Leben und Werk

La dramaturgie de Wedekind est une dramaturgie à tendance lyrique, qui ne respecte pas le découpage en tableaux qui se suffisent à eux-mêmes, des concentrés de vie, qui peuvent contenir plusieurs scènes, mais également ne comporter que quelques phrases, quand il s’agit d’évoquer un climat particulièrement intense. Ainsi se constituent des moments plus ou moins autonomes, et nous ne voyons pas à proprement parler de fil conducteur : seulement les stades d’un développement, peut-être aussi une mosaïque. Il n’y a pas d’action au sens habituel. La cohésion naît d’une intensité croissante, d’une progression des événements par étapes, de l’organisation des tableaux avec leur effet de parallèle et de contrastes, ou même ceux qui n’apportent pas de mouvement sont importants. Ce qui donne à la forme sa nécessité.

HENRY DARGER

DessinsLe vieil homme est mort en 1973, à 81 ans, à l’hospice. Plongeur à la cuisine d’un hôpital, il avait vécu 40 ans dans une seule chambre d’une pension de famille; sans héritiers, il légua tous ses biens à ses logeurs. Orphelin de mère à 4 ans, surnommé “Crazy” dès son enfance, il fut placé à 8 ans en pension, puis à 12 ans, surpris en train de se masturber en public, dans une institution pour handicapés mentaux: il semble y avoir subi les pires sévices, et il s’en enfuit à 17 ans quand son père meurt. Très dévot, considéré comme un peu “simplet” par ses voisins, il n’eut qu’un seul ami, aussi marginal que lui, et vécut en reclus dans sa chambre; sa requête d’adoption d’une petite fille fut refusée. Il était aussi obsédé par la météo (comme Kosek).

Après sa mort, ses logeurs entrèrent dans sa chambre et, au milieu d’un fouillis indescriptible, découvrirent des milliers de pages et des centaines d’aquarelles et d’illustrations, son oeuvre, L’histoire des Vivian Girls, épisode de ce qui est connu sous le nom des Royaumes de l’Irréel, de la violente guerre glandéco-angélinienne, causée par la révolte des enfants esclaves. Il a commencé à l’écrire en 1910, traumatisé par la drame arrivé à une petite fille enlevée et violée (et par le fait d’avoir perdu la photo de cette petite fille, qu’il conservait pieusement), et il l’illustre à partir de 1918.Darger nous montre des scènes d’une brutalité épouvantable, mais où les personnages sont angéliques, petites filles modèles dans des cadres idylliques, au visage toujours identique, sans expression, sans individualité. Ses tableaux apocalyptiques ne sont que violence, sévices, étranglements, éviscérations. Sur l’un d’eux (détail ci-dessus), digne d’un Massacre des Innocents, le sang coule à flot, les petites filles sont pendues, éventrées, poignardées, crucifiées (l’une la tête en bas), étranglées par des lassos; au milieu trône un dessin anatomique de viscères emprunté à une encyclopédie médicale. Le thème essentiel est bien sûr la lutte du bien et du mal, de la chrétienté et du paganisme, des petites filles pures et des affreux soldats ennemis; c’est la perte de l’âge d’or et les efforts pour le retrouver par le martyre, par l’accession à la sainteté.

Tous ses dessins sont traités dans des tons doux, tendres; Darger, dessinant mal, colle ou décalque des motifs de catalogues ou d’illustrés enfantins ramassés dans les poubelles. Il ignore la perspective, déroule son histoire au sein d’une même planche panoramique. Il y invente une géographie, une toponymie, des drapeaux, des uniformes inspirés de la guerre d’indépendance ou de la guerre civile. Un dessin de caverne, abri aux abîmes insondables, plein de bruits tonitruants et d’odeurs suaves, est envahi par l’encre noire qui dévore toute la page.

On évoquera tour à tour Goya, Callot, Norman Rockwell, les frères Chapman ou Glen Baxter; mais c’est Sade qu’il faudrait appeler à la rescousse.

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